Je pensais que tout cela était
derrière moi, et puis il y a eu cette discussion, hier soir, avec une de mes
vieilles connaissances. On a abordé la question : « tu as des
nouvelles des autres du lycée ? ».
Elle me répond que non, que ce n’est pas plus mal. De fil en aiguille,
on en vient à discuter des comportements de mes anciens camarades. Elle m’avoue
qu’une partie ne m’aimait pas, sans même m’avoir parlé ni cherché à me
connaitre, soit, je peux le comprendre (même si je trouve cela idiot). Mais le
pire fut d’apprendre qu’une fille, qui se déclarait être mon amie à l’époque,
ne venait me parler que quand elle allait mal, non pas pour me raconter ses
peines, mais pour que je raconte les miennes. Il faut dire que ma vie à cette
époque était difficile (mots clefs : faim, pauvreté, maltraitance…), et
j’agissait sur elle comme un remède à ses problèmes, un peu comme quand on
regarde confessions intimes et que d’un coup de baguette magique nos problèmes
s’effacent et notre vie nous semble tout de suite plus rose. Je ne pensais pas
que ce genre de personne existait, ni même que j’en avais été la victime.
En contrepartie, je suis rassurée
quand je vois le fossé qui se creuse, chaque jour, entre mes anciens camarades
de lycée que je détestait tant, et moi. C'est-à-dire qu’ils sont dans leurs
écoles, leurs universités, au chômage, dans le carcan du schéma familial
papa-maman. Tandis que moi j’ai su me débrouiller, grâce à mon courage, car il
en faut pour tout quitter à 18 ans, se détacher du foyer fiscal de ses parents
et se débrouiller seule. Finalement, ce n’est pas le fait d’être né dans une
famille où il y a peu de difficulté (même si toute famille en rencontrera un
jour ou l’autre) c’est l’intelligence (cette dernière, pour moi, ne se mesure
pas avec les notes ou les compétences à apprendre par cœur, c’est le fait de
s’adapter à une situation et s’en sortir).
Aujourd’hui, j’aimerai revoir
toutes ces personnes, et leur dire : « Regarde où je suis, j’ai un
travail, des études, un logement dans le 8éme arrondissement de Paris, je m’en
sors plutôt bien. Tu en es où toi ?»